Des chercheurs conçoivent de nouveaux outils de diagnostic pour l’étude des champignons telluriques contribuant à l’absorption des éléments nutritifs et à la santé des plantes dans les champs agricoles.

L’amélioration de la santé des plantes et de la fertilité des sols est primordiale à l’optimisation du rendement et de la profitabilité en production agricole. Une meilleure compréhension des effets bénéfiques des organismes telluriques sur l’absorption des éléments nutritifs et sur le rendement des plantes permet aux agriculteurs d’optimiser leur utilisation d’engrais et de fertilisants. Une utilisation raisonnée de l’engrais et des fertilisants favorise en retour la réduction des impacts sur l’environnement et l’émission de gaz à effet de serre, tout en améliorant la séquestration de carbone et la profitabilité.

« Les champignons mycorhiziens arbusculaires (CMA) sont des organismes telluriques qui sont naturellement présents dans la plupart des sols cultivés du Canada, explique la Madame Chantal Hamel, chercheuse pour Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) à Swift Current, en Saskatchewan. On peut les considérer comme une sorte de probiotiques pour les plantes, dont ils peuvent améliorer la santé de plusieurs façons. Les CMA prennent la forme d’un vaste réseau de connexions souterraines à l’intérieur et à l’extérieur des racines qui facilitent l’absorption rapide de nutriments par les plantes, notamment le phosphore, le cuivre et le zinc, qui ne sont pas très mobiles sous terre. » Les CMA sont également reconnus pour protéger les plantes contre le stress abiotique (chaleur, sécheresse, froid, salinité) et les pathogènes transmissibles par le sol, comme le Fusarium et le Pythium.

Il existe plusieurs espèces de CMA dans les sols, mais seulement une douzaine d’entre elles sont dominantes dans les régions agricoles à travers le Canada. Les CMA sont biotrophiques, ce qui signifie qu’ils ont besoin de plantes vivantes pour compléter leur cycle de vie. Le type de mycorhizes présentes dans le sol dépend donc des plantes cultivées dans le champ. « Les CMA créent des associations préférentielles avec certaines plantes, dit Mme Hamel. Les périodes de monoculture peuvent donc réduire la diversité des CMA. Aussi, certaines cultures comme le canola et la moutarde ne permettent pas cette symbiose. Après une campagne agricole de canola ou de moutarde, ou après une année de jachère, la population de champignons dans le sol sera réduite. »

L’établissement d’une symbiose entre des plantes et des CMA est semblable à la fixation de l’azote (N) chez les légumineuses. « Si du N est appliqué à une culture de pois, par exemple, les plantes n’auront pas besoin d’ajuster leur propre niveau de N, dit Mme Hamel. Aussi, s’il y a trop de phosphore (P) dans le sol, la plante ne créera pas de symbiose avec les CMA et les avantages que ceux-ci pourraient apporter du point de  vue de l’absorption des nutriments et de la lutte contre les maladies seront perdus. Comme le phosphore a tendance à s’accumuler au fil du temps plutôt que de se s’évacuer sous forme liquide ou gazeuse comme le N, il est très important d’établir un système qui permette d’ajuster la fertilité des sols adéquatement de façon à conserver les avantages de la symbiose. »

Nouveaux outils de diagnostic et modèles de cultures

Jusqu’à tout dernièrement, il était difficile de déterminer l’abondance relative et la répartition des CMA dans les champs agricoles. Les progrès récents et les nouvelles techniques de recherche sur la microbiologie des sols permettent maintenant aux chercheurs de créer des outils de diagnostic innovateurs et des modèles de cultures favorisant la gestion efficace des champignons bénéfiques.

« Nous avons développé deux méthodes innovatrices de déterminer l’abondance relative et la distribution des CMA dans les champs agricoles, dit Mme Hamel. Les techniques de séquençage d’ADN nous ont d’abord été utiles pour identifier des CMA et établir leur répartition, mais nous avions besoin d’autres techniques pour véritablement déterminer l’abondance et ses répercussions sur la production agricole. La première de ces méthodes est la mesure directe des CMA à l’aide d’une sonde d’ADN, ce qui peut être efficace et très utile, mais aussi très coûteux. La deuxième technique se base sur des modèles informatiques qui ressemblent à ceux utilisés pour les prévisions météorologiques et utilise des données pédologiques recueillies au moyen de tests standardisés. »

Mme Hamel et son équipe ont collaboré avec Western Ag Innovations, de Saskatoon, pour concevoir un modèle de prévision pour le blé. « L’abondance et la répartition des CMA peuvent être évaluées à partir d’un test pédologique standardisé et de données de géolocalisation au moyen d’un modèle virtuel, dit-elle. Puisqu’il utilise toutes les informations à jour disponibles pour faire des recommandations relativement à l’engrais, ce modèle peut maintenant inclure des renseignements sur l’abondance des CMA et sur la capacité du sol à fournir les éléments nutritifs nécessaires aux cultures. Cette technique ne requiert pas de tests supplémentaires; toutes les informations sont disponibles dans les tests pédologiques standardisés et dans les bases de données nationales relatives aux sols et au climat. »

Les derniers détails du modèle de prévision pour le blé sont sur le point d’être réglés et Mme Hamel espère recevoir du financement additionnel au cours des prochaines années afin de pouvoir développer de nouveaux modèles de prévision pour d’autres cultures. « Pour l’instant, les données dont nous disposons ne concernent que les sols des Prairies canadiennes et du nord des États-Unis, dit Mme Hamel. Néanmoins, environ 80 % des terres agricoles du Canada se situent dans cette région, le modèle virtuel s’applique donc à une très grande superficie. Les outils devraient être disponibles en 2013, à temps pour la saison de production agricole. »

Ces outils et ces modèles offriront aux agriculteurs des informations plus précises leur permettant de rectifier leur utilisation d’engrais et de conserver les avantages de la symbiose. Mme Hamel croit que ces nouvelles ressources, combinées à la création de meilleurs inoculants et molécules-signaux pour manipuler les CMA ainsi que le développement de cultivars avec de meilleures propriétés symbiotiques, permettront aux agriculteurs de se créer une base de ressources afin d’améliorer la stabilité du rendement de leurs cultures, tout en améliorant la durabilité et la résistance des écosystèmes agricoles.

« Ces nouveaux outils de diagnostic aideront les agriculteurs à réduire leur utilisation d’engrais, ce qui permettra de réduire les émissions de gaz à effet de serre et les impacts environnementaux, tout en augmentant la marge de profit des agriculteurs, » dit la Mme Chantal Hamel.

Contact :
Chantal Hamel
Tél. : 306-778-7264
Courriel : [email protected]

http://www4.agr.gc.ca/AAFC-AAC/display-afficher.do?id=1181939972412&lang=fra

http://www.organicagcentre.ca/OSC/Subproject_A/osc_activity_a1_success_2012.asp